RCBS est l'un des fabricants Américain connu et apprécié pour la qualité de ses produits. Des kits complets de démarrage sont proposés pour un moindre coût. Il convient néanmoins d'acheter en complément les outils nécessaires à la construction de chaque calibre.

Le chargement de cartouches demande un minimum de connaissances, mais également du matériel de qualité. Présenté, un kit complet de marque RCBS, l'une des références dans le domaine.

SECURITE DES UTILISATEURS DE MUNITIONS A FONCTIONNEMENT PYROTECHNIQUES

 Depuis des années, vous êtes toujours plus nombreux à me demander des conseils et des consignes techniques diverses afin de vous lancer ou de développer l’activité du chargement ou du rechargement de cartouches de chasse et de tir, de manière individuelle ou artisanale. Bien qu’il s’agisse d’un sujet que je maîtrise parfaitement, je me suis toujours refusé de communiquer des « recettes de chargement » pour cartouches à fonctionnement pyrotechnique. Et pour cause, au vu de ce que je suis amené à rencontrer chaque année. On ne s’improvise pas chargeur de cartouches au coin de la table de la cuisine, du salon, dans un couloir ou dans un coin de l’atelier. L’emploi et le maniement de poudre, ainsi que l’assemblage d’éléments de cartouches, présente un risque non négligeable trop souvent oublié ou banalisé qu’il convient pourtant de considérer à sa juste valeur, compte tenu des conséquences qui peuvent en résulter.

Internet est aujourd’hui la porte ouverte à tout et surtout n’importe quoi dans ce domaine. La règle de base est de ne jamais prendre pour argent comptant toutes les recettes magiques qui permettent de booster un calibre. Il n’est pas possible de booster un calibre sans prendre des risques inconsidérés ; si on vous dit le contraire, vous êtes en train de vous faire duper. Vous jouez avec votre intégrité, votre vie, et peut être avec celle des autres.

N’acceptez jamais de tirer des cartouches non manufacturées dont vous ne connaissez pas la provenance exacte ou l’origine de chargement. Ne faites jamais confiance au « Diable ».

Le chargement de cartouches est une activité exigeante et intransigeante qui ne laisse aucune place à l’erreur. C’est une activité qui s’apprend mais qui ne s’improvise pas ; il est important de bien se documenter et de connaître parfaitement le sujet avant de charger sa première cartouche qui peut être la dernière. Toujours se référer à des valeurs sûres et éprouvées telles que les données fournies par les Bancs d’Epreuve Français ou Européens.

Personne ne peut s’improviser chargeur ou rechargeur de cartouches quelles qu’elles soient, à balle, à grenaille, à douille métallique, plastique, carton ou autres.

N’ayant aucune maîtrise sur l’un des éléments ou sur l’ensemble des éléments en présence, la nature des outils, le mode et les techniques de mise en œuvre ou de travail, que tout un chacun est à même d’utiliser ou d’employer pour arriver au résultat, je me suis toujours refusé de communiquer « des recettes » de chargement aussi bien standard que destinées à « Booster » les dits chargements. Je dois avouer que les seuls cas de figure ou j’ai donné des renseignements techniques, cela a été dans le seul but d’éviter un accident imminent ou inévitable. Même si mes conseils ou préconisation d’ordre technique ont évité et évitent encore de nombreux accidents, je ne souhaite pas « surfer » sur ce type d’activité que je laisse très volontiers à d’autres qui ont la prétention de « faire valoir ». Voici, ci après détaillé, un exemple parmi de nombreux autres, très parlant, qui matérialise la nature des problèmes auxquels je suis confronté chaque année dans le cadre d’expertises suite à sinistre.

Je laisse à chacun le soin de méditer sur un sujet aussi brulant qu’explosif.

Ce cas de figure est un cas d’expertise réalisée dans un cadre privé sur mandat d’un armurier qui venait de vendre une arme neuve (particulièrement solide) et qui avait un peu de mal à comprendre ce qui s’était passé, et surtout de fournir une explication crédible et impartiale à son client. Il va sans dire, que dans ce cas de figure, la garantie ne peut en aucun cas être revendiquée et être mise en jeu.

Le tireur a eu une chance phénoménale qui ne se reproduira pas ; il s’en est sorti simplement avec des lésions superficielles et une bonne peur. L’arme bien que très fortement éprouvée est restée apte au tir après une réparation significative.

Cartouche métallique à balle de calibre 300 Winchester Magnum; un calibre très répandu et apprécié des chasseurs de grand gibier Français.

Douille ayant subit une surpression de très haut niveau; amorce percuté à un niveau de pression standard CIP positionnée pour donner l'échelle.

Le phénomène de surpression des cartouches de chasse et de tir

 Avec l’augmentation constante du prix des métaux, le prix des munitions de chasse et de tir augmente proportionnellement de fait. Même si certains fabricants proposent encore quelques chargements qui restent à des prix abordables, la grande majorité des cartouches pour armes longues d’épaule commencent à atteindre des sommets inaccessibles pour une majorité de budgets serrés. Il y a une dizaine d’années environ que le phénomène a commencé à se manifester, cependant il se fait réellement ressentir depuis ces trois ou quatre dernières années. Cela a pour conséquence de lancer une nouvelle mode, ou plus précisément, une nouvelle activité qui connait un essor constant. Il s’agit du rechargement des cartouches de chasse pour armes à canon rayé, autrement dit des cartouches dotées d’une douille métallique. Cette activité n’est pas nouvelle au sens propre du terme, car jusque là un grand nombre de tireurs la pratiquaient ; principalement pour les armes de poing, mais plus rarement pour les armes d’épaules.

Comparaison entre une douille tirée dans des conditions normales et une douille en surpression à environ 9318 bars calculés par projection avec reconstitution à l’aide d’un logiciel de balistique intérieur performant.

Les outils de construction ou de reconstruction de la cartouche doivent être précisément adaptés au calibre à charger ou recharger.

L’état de l’art

Dans le milieu de la chasse, les utilisateurs se limitaient habituellement au rechargement des cartouches à grenaille de plomb ou éventuellement aux balles de calibre correspondant. Seulement voilà, les choses ont changées. Je pense pouvoir dire que depuis que cette activité se développe, il ne se passe pas un mois, sans que je sois sollicité ou confronté à des questions portant sur le rechargement, mais aussi et surtout, beaucoup trop souvent à mon goût, à des problèmes de chargements inadaptés qui engendrent des accidents de natures et d’importances variables. Je pense qu’il est donc important de faire le point sur cette situation qui peut être génératrice de problèmes ou de situations à risques susceptibles d’engendrer, non seulement, des dommages mécaniques, mais également des dommages corporels, lorsque les règles élémentaires de sécurité ne sont pas respectées. Depuis un peu plus de trente ans que je pratique le chargement pour différentes raisons et à différentes destinations, tant pour la pratique du tir que dans un cadre de recherches et développements, j’ai appris qu’il ne faut jamais essayer de « doper » une cartouche, et s’en tenir exclusivement aux tables balistiques élaborées par les laboratoires compétents, en conservant scrupuleusement, la marge de sécurité qui est donnée. En matière de chargement, il n’est pas possible d’innover, et le simple fait de changer un composant ou une technique peut avoir des conséquences incalculables.

Comparaison entre une douille de calibre 300 Winchester Magnum tirée à un niveau de pression normal et la douille en surpression à environ 9318 bars.

L'utilisation d'une balance de précision en grammes et non en grains est indispensable. Le grains n'est pas une mesure valable reconnue par le Système International Métrique.

Le chargement est une affaire de professionnels

Tout d’abord, lorsque l’on pratique le rechargement il convient de largement se documenter afin de connaître le sujet sur le bout des doigts. Ensuite, il est impératif, pour démarrer, de trouver une personne qui a de l’expérience en la matière depuis au moins cinq à six ans et qui a fait la preuve de son sérieux et de sa compétence. Ensuite, la troisième chose, consiste à acheter du matériel de qualité, qui répond précisément aux besoins rencontrés. Enfin la dernière chose, il est impératif de consacrer un coin ou une pièce dans lequel ou laquelle l’activité sera pratiquée. Ha j’oubliais, la cigarette ou toute source de chaleur directe à proximité du poste de chargement est à bannir totalement. En terme de documentation, il est incontournable de comprendre le manuel du rechargement écrit par mon défunt confère René MALFATTI ; personne en France n’a jamais fait mieux. La SNPE édite également un petit livret sur le rechargement qui, bien qu’incomplet sur la technique, donne une base pour de nombreux calibres d’armes de point ou d’épaule. Récemment mon collègue Alain GHEERBRANT a également publié un Guide Pratique du Rechargement artisanal pour de nombreux calibres destinés aux chasseurs et tireurs. Il est fortement conseillé de se munir de cet ouvrage, de le lire, et surtout de le comprendre parfaitement. Les chargements indiqués doivent être scrupuleusement respectés et considérés comme un maximum à ne pas dépasser. Personne ne peut être responsable d’une mauvaise interprétation ou d’une mauvaise manipulation qui peut découler de l’usage de ces ouvrages. Je ne vais pas m’étendre sur ce sujet qui n’est pas le fondement direct de cet article, mais aborder le phénomène désormais courant ou presque que je rencontre avec les différents intervenants ou acteurs qui s’associent à l’activité de chargement ou de rechargement.

A gauche l’empreinte d’un culot de douille tiré à un niveau de pression normal conforme aux normes CIP ; à droite empreinte d’un culot de douille et du logement d’amorce suite à une surpression à environ 9318 bars. Amorce neuve en place pour échelle de dimensions et sans amorce.

Afin de démonter une cartouche sans risque dans le but de la neutraliser, le marteau à inertie est une excellente solution peu onéreuse.

Recharger une cartouche

Recharger une cartouche n’a rien d’anodin contrairement à ce que pense bon nombre de pratiquants ou futurs pratiquants. Le rechargement est une affaire de vrai professionnel, qui demande un sérieux et une rigueur absolue, faute de quoi on peut être certain d’aboutir à un problème. Recharger une cartouche implique de manière incontournable un minium de connaissances et un matériel adapté ; recharger une cartouche ne s’improvise pas. Dans le cas de figure présenté dans cet exposé, le chargeur amateur improvisé a eu beaucoup, beaucoup de chance. Tout d’abord d’avoir eu entre les mains une arme à fonctionnement semi-automatique ; deuxièmement que cette arme ait été d’une construction solide, troisièmement que le verrouillage de la culasse se soit contenté de subir un important tassement sans rupture ; quatrièmement qu’une partie de la tête de culasse se soit rompue permettant au culot de la douille de fluer de manière importante, permettant ainsi, de jouer le rôle d’amortisseur et de répartiteur de pression, cinquièmement que le système d’emprunt de gaz ait joué favorablement le rôle de « valve » de surpression, sixièmement que l’arme n’est pas été sujette à une rupture. Le cas de figure présenté est tout à fait exceptionnel ; il s’agit de la seconde surpression que je rencontre parmi quelques centaines, ayant atteint un tel niveau de contraintes qui a engendré une déformation axiale et radiale de la douille aussi importante, sans destruction de l’arme et de dommages corporels collatéraux.

Côtes du logement d’amorce suite à une surpression d’environ 9318 bars ; les dimensions du logement d’amorce possèdent normalement un diamètre de 5,33 mm pour une hauteur de 3,30 mm, soit une augmentation de diamètre supérieur à 55% après surpression.

Détail du culot de la douille et du logement d’amorce suite à une surpression d’environ 9318 bars ; la hauteur du logement d’amorce a été réduite d’environ 22% par rapport à sa valeur initiale.

L’analyse des désordres

Lorsque l’armurier dépositaire de l’arme m’a présenté l’ensemble des pièces constituant les désordres, j’ai compris, dès le premier coup d’œil qu’il s’agissait d’un cas particulier qui ne pouvait être lié au chargement normalisé d’une cartouche du commerce, quand bien même celle-ci aurait été sujet à un défaut de stockage. L’expérience aidant, l’analyse approfondie des éléments, plus particulièrement des traces physiques et mécaniques de la douille, m’ont rapidement permis de comprendre de manière non équivoque, qu’il s’agissait d’une munition qui avait été sujette à des manipulations douteuses. Des traces anormales, apparentes en périphérie du collet de la douille, laissaient entrevoir, que le sertissage avait subit des contraintes mécaniques douteuses d’aspect irrégulier, anormal. La douille ceinturée de calibre 300 Winchester Magnum présentait une déformation axiale excessive et un effondrement total de la structure au niveau du culot. Cette manifestation physique et mécanique nous laissait supposer que nous étions manifestement en présence d’une surpression dont l’ordre de grandeur était largement supérieur à 30% de la pression d’épreuve CIP piézo normalisée. Aucune munition du commerce chargée en manufacture n’est normalement susceptible de dépasser un tel niveau, même mal stockée. En tout état de cause, je n’ai personnellement jamais rencontré de cas. D’autre part, les dispositions norminatives de chargement des munitions à caractère pyrotechnique sont mises en œuvre pour que ce type de phénomène ne puisse se produire. Pour cela, il est conservé une marge de sécurité statistique importante. Dans ce cas de figure, l’effort générée au niveau du culot de la douille a fait fluer le métal dans des proportions telles, qu’il a engendré une rupture partielle de la couronne de la tête de culasse. Inutile de dire que l’ouverture de cette dernière a été impossible, et qu’il a fallu prendre des dispositions mécaniques particulières pour permettre l’ouverture sans destruction de l’arme. Ce qui au demeurant a été particulièrement compliqué.

L’analyse macroscopique du collet de la douille laissait apparaître des traces anormales non compatibles avec le sertissage d’origine réalisé par le fabricant initial supposé au travers du marquage résiduel de la douille.

La couronne de la tête de culasse n’a pas été en mesure de résister à la pression excessive dégagée par le tir de la cartouche et le retour de gaz.

La manipulation ayant engendré le sinistre

Au vu de l’état impressionnant de la douille, nous nous sommes posé la question de savoir quelle était la manipulation spécifique qui avait été faite pour permettre d’atteindre un tel niveau de pression susceptible d’engendrer une telle déformation. Mon expérience en la matière m’avait permis par le passé (dans le cadre d’une recherche sur le point de rupture des matériaux) de rencontrer un phénomène de type équivalent au cour duquel nous avions atteint un seuil d’un peu plus de 10 000 bars. J’estimais, le phénomène en présence, proche de ce seuil précédemment atteint, en limite du point de rupture pour une arme dotée d’une culasse à verrou, ou du moins, de dégâts irréversibles. Afin de valider cette hypothèse, nous nous sommes attachés à tenter de reproduire par projection, à l’aide d’un logiciel de balistique intérieure, différentes possibilités dans le cadre d’un rechargement, avec les erreurs les plus probables ; notamment en remplissant complètement la douille avec des poudres compatibles pour le calibre et différents projectiles le plus couramment commercialisés. Ces différentes projections et hypothèses de calculs nous conduisaient à des pressions de l’ordre de 5000 Bars à 7000 Bars selon les cas les plus extrêmes. Ces résultats semblaient pourtant assez loin de la réalité des éléments matériels dont nous disposions. Ce n’est véritablement que lorsque le propriétaire de l’arme nous a avoué quelle était l’origine du problème que nous avons pu établir la proche réalité du phénomène physique et mécanique auquel nous étions confrontés. Assez loin de toutes les hypothèses de rechargement que nous avions échafaudées, le logiciel de calcul nous permettait d’atteindre l’incroyable pression d’environ 9318 Bars !!! Il faut dire que dans ce cas de figure, la « recette » était cocasse et pour le moins inattendue !!! Cela nous aura au moins permis d’avoir une expérience de plus dans le cadre de l’innovation. Je ne rentrerai pas dans les détails de cette manipulation afin d’éviter toute dérive tendant vers un record, mais l’auteur de cette manipulation a eu véritablement un très gros coup de chance. Les photos parlent d’elles mêmes et sont plus explicites que n’importe quel discours.

Les contraintes mécaniques engendrées par la pression excessive ont permis au culot de la douille de se mouler sur la table de portance de la tête de culasse qui n’a pas été en mesure de se déverrouiller suite au frettage de la douille dans la chambre.

Calculs dans le temps : graphique de reconstitution des conditions de tir réalisé à l’aide d’un logiciel de calculs de balistique intérieure performant.

Calculs sur la distance de progression du projectile dans le canon ; rapport de la pression dans un temps donné et évolution de la vitesse par rapport à la longueur du canon.

La pression directe dégagée par le tir de la cartouche de calibre 300 Winchester Magnum a été d’environ 9318 bars ; la pression supportée par la tête de culasse lors de l’effondrement du culot de la douille a été de l’ordre de 6700 bars ; la différence de pression ayant été absorbée conjointement au travers du fluage du métal et par l’emprunt de gaz qui a limité les dégâts.

Règle absolue de ce qu’il ne faut jamais faire

Lorsque des cartouches ont été manipulées à maintes reprises, qu’elles ont subit des chocs d’amplitudes diverses, qu’elles ont souffert dans le magasin ou le chargeur de l’arme à supporter le recul brutal des tirs, il arrive au terme d’un certain temps qu’elles présentent des anomalies. Lorsque certaines de vos cartouches vieillissantes présentent une anomalie qui ne la rend plus conforme à sa définition typologique initiale, apportez la à votre armurier habituel afin qu’il en assure la destruction. Ne jamais re-sertir le projectile d’une cartouche à douille métallique par quelque procédé que ce soit. Ne jamais compléter la charge de poudre d’une cartouche dont le projectile s’est libéré du sertissage initial. Ne jamais remplacer le contenu d’une douille par une autre poudre ou autre chose. Ne jamais tirer une cartouche dont le projectile s’est desserti, ou enfoncé à l’intérieur de la douille. Ne jamais tirer une cartouche présentant une déformation par écrasement ou pincement. Ne jamais modifier la nature d’un projectile ou le substituer par un autre de même diamètre ou de diamètre différent. En clair, ne jamais intervenir sur les caractéristiques physiques, chimiques, ou mécaniques d’une cartouche manufacturée par quelque moyen que ce soit. En aucun cas, les fabricants d’armes ou de munitions ne peuvent être tenus pour responsables des dommages qui pourrait découler de toute intervention quelle qu’elle soit sur les caractéristiques d’origine d’une cartouche.

Expertise,mise en page, photos et texte

Joël SERRE